Je me lance !
27/3/2024

Face aux défis, des explorateurs se retroussent les manches !

Rencontre avec Clotilde De Montpellier - Farm for Good : développer une agriculture wallonne positive et solidaire

Janvier 2023, Liège-centre. Du haut de mon immeuble, la faim se fait sentir. 19h30 : il serait temps de manger un bout. Et si on se faisait livrer un petit repas ? C’est parti pour ce sport urbain si répandu : je scrolle à tout va, évaluant les options et passant d’une appli à l’autre pour trouver la perle rare. Et là, une pensée m’arrête net : si jamais une catastrophe arrivait, mes voisins et moi-même, bloqués dans nos clapiers à lapin, serions incapables de produire notre nourriture et de répondre à ce besoin primaire. Nous sommes aujourd’hui plongés dans une dépendance folle, approvisionnés au quotidien par ces camions qui affluent remplis de produits, ayant bien souvent traversé les frontières. Des siècles que nos ancêtres cultivent la terre, se transmettant leurs savoirs de génération en génération et je dois bien l’avouer : je suis incapable de cultiver la moindre pomme de terre, pourtant si appréciée sous sa forme frite.

Quelques jours plus tard, je rencontre Clotilde de Montpellier, fondatrice de Farm for Good, une ASBL créée en 2020, accompagnant aujourd’hui 30 fermes wallonnes dans leur transition agroécologique et visant à relocaliser les filières alimentaires sur notre territoire.

Lors de son doctorat mené sous forme de recherche-action à l’UNamur, et dans sa ferme, Clotilde constate rapidement que de nombreux agriculteurs souhaitent opérer une transition vers une agriculture régénérative et plus résiliente, mais qu'ils sont confrontés à de nombreux obstacles les empêchant de changer de pratiques (endettement, épuisement des sols, volatilité des prix, faible rentabilité …). Et le temps presse ! Clotilde me partage 2 chiffres, me laissant bouche bée :

1.      La Wallonie perd chaque semaine une quarantaine d'exploitations agricoles.
2.     Seule 1 ferme sur 5 peut compter sur un repreneur (âge moyen : 50 ans).

Mais alors, comment lever ces freins ? À son échelle, Farm for Good réunit une communauté d’agriculteurs engagés dans la transition, mettant à disposition un plan d’action, une boîte à outils et des compétences techniques et économiques pour assurer le suivi. L’ASBL sert également d’intermédiaire en réunissant autour de la table, agriculteurs et entreprises de transformation alimentaire afin de renouer les liens. Elle accompagne ces acteurs pas à pas dans la relocalisation de leur filière.

Leur premier succès ? Le partenariat avec l’entreprise Bister pour la création d’une moutarde 100% bio, belge, équitable et durable. Par leurs actions, Farm forGood et son réseau contribuent à produire des aliments de qualité, restaurer la fertilité des sols et la biodiversité, stocker du carbone et rendre les fermes plus rentables et transmissibles.

Que retenir de son expérience entrepreneuriale à impact ?

·     La force du réseau : trouver ses alliés. Ils existent !

·     La légitimité : un projet par et pour les agriculteurs, avec la contribution du monde scientifique.

·     L’agilité de l’entrepreneure, sa rigueur et une mission incarnée face à l’urgence.

« On avance et on rectifiera après s’il le faut. L’heure est à l’action ! ».

Comment aider ?

·     S’informer en 1h : le film« Kiss the Ground » (disponible sur Netflix, et gratuit pour les étudiants et écoles).

·     En tant qu’entreprise dans l’alimentaire : vous vous posez des questions sur vos approvisionnements ? Contactez-les !

·     En tant que consommateur : repérer le label « Farm for Good » en magasin.

·     Suivre le projet : création de la coopérative et levée de fonds au printemps 2023.

 

Amandine Sanfratello - CHARGÉE DES RELATIONS ENTREPRISES AU VENTURELAB

 

Rencontre avec Rob Hopkins : oser le ridicule pour transformer nos sociétés

De l’autre côté de la Manche, depuis 2007 l’action s’organise à travers le Réseau Transition, des communautés qui se rassemblent pour réimaginer et reconstruire notre monde. Rob Hopkins est l’un des co-fondateurs de ce mouvement qui nous invite à imaginer la transition à travers l’exploration de nouveaux possibles : de nouveaux récits et manières de faire société, qui font la part belle au vivant et aux liens sociaux…

Rob Hopkins martèle l’urgence d’une action forte, mobilisatrice et réellement porteuse de changements radicaux. Il nous partage sa vision [1] pour cette grande aventure à laquelle il nous presse de prendre part.

It’s urgent to take action now. How can we feel this sense of urgency, yet without feeling down because of culpability?

First thing is that we are all culpable, to varying degrees, for what's happening. For me, the best way to counter this is to do whatever we can in our own lives, with the knowledge that it's not enough but that it leads by example and inspires the others around us. Alongside that, we have to recognise also that we live in a particular world, a particular economy and culture, and we can't be 100% perfect. But feeling like we are part of the solution is much better than knowing that we are a part of just looking the other way while everything just continues to get worse. 

How can we take actions that are significant enough, yet without feeling paralyzed by the amplitude of the challenge?

This is not easy. While there are many things we can do as individuals, the real change that needs to happen is systems change. The work that I do through the Transition movement needs to happen alongside deeper systems change activism, like Extinction Rebellion, 350.org, the Sunrise movement and so on. I sometimes say we need a big bold beautiful Yes, and a big bold beautiful NO working together. The Institute for the Future in the US says "any useful statement about the future should at first seem ridiculous". I want to really urge you to be ridiculous in what you do. If what you are proposing isn't ridiculous, then it probably isn't ambitious enough.

So work on something that you feel you can achieve, but keep aspects of it that are ridiculous, brave, bold and positive.  

As entrepreneurs, individuals and collectives willing to take action, where should we start ?

Howard Thurman once said “Don't ask yourself what the world needs. Ask yourself what makes you come alive, and go do that, because what the world needs is people who have come alive.” Find the thing you love, that you see could have the potential to make real change, that is of service to the times we're in, and then bring your brilliant entrepreneur thinking brain to it to figure out the smart ways to make it work.

Then I would say that this is a thrilling time where only big bold ideas will save us. The time for incrementalism is over. So you have the freedom to be really adventurous.

And remember to see yourselves as storytellers. If you create a really compelling story, the support will come.

[1] Les propos, partagés en anglais par Rob Hopkins, n’ont pas été traduits pour rester fidèles au message

Propos recueillis par Isaline Thirion.

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